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Anne-Marie

À quoi ressemblent vos symptômes d’endométriose ? En ce moment, comme je suis sous Lupron Dépôt, mes symptômes sont pratiquement nuls. Comme je suis en ménopause chimique, ma libido est moins grande d’autant plus que les douleurs durant les relations sexuelles sont souvent présentes, selon les positions. Mais avant le Lupron, j’avais des douleurs extrêmes à tous les jours; je me sentais bien environ 2 jours par mois. Je me sentais comme si j’avais des barbelés et des épines qui me transperçaient le ventre tout le temps. Je n’ai pas mes règles depuis 4 ans avec ma médication, mais avant, elles ont toujours été tellement douloureuses que je m’évanouissais, j’avais du mal à sortir de mon lit et j’étais souvent pliée en deux sans pouvoir bouger, parce que ça faisait trop mal.

Comment a été votre parcours vers un diagnostic d’endométriose ? Depuis mes premières menstruations à 11 ans, j’ai toujours eu des règles extrêmement douloureuses. Évidemment, les médecins ne faisaient que me prescrire du Naproxin, me disant que les douleurs étaient normales. À 20 ans, j’ai été hospitalisée une nuit à l’urgence parce que j’étais pliée en 2 de douleur. L’urgentologue croyait à une appendicite, alors j’ai passé un scan le matin, révélant plutôt des kystes, qui après avoir du passé une échographie pelvienne et endovaginale, se révélait être de la grosseur d’un pamplemousse sur mon ovaire droit. J’ai subi ma première kystectomie. J’ai continué à avoir des douleurs, puis 4 ans plus tard, à 24 ans je suis retournée voir mon gynécologue qui m’a diagnostiqué un nouveau kyste sur l’ovaire droit. Une deuxième kystectomie à l’ovaire droit a eu lieu. Les douleurs n’ont pas cessé et à 25 ans, je suis retournée voir le gynécologue et j’avais maintenant un kyste sur chaque ovaire, troisième kystectomie ! C’est à ce moment, que le résident qui l’accompagnait s’est rendu compte que je faisais de l’endométriose. Quand même, 5 ans plus tard, sans compter toutes les années avant mes 25 ans où je n’en cessais plus de me plaindre aux médecins de mes douleurs.

Quelle a été votre expérience avec les traitements pour l’endométriose ? Comme je l’ai dit précédemment, j’ai eu trois kystectomies pour enlever tous les kystes qui se sont développés sur mes ovaires, j’en ai encore d’ailleurs. Après le premier diagnostic de kystes ovariens, j’ai commencé plusieurs traitements hormonaux, pilule (j’en ai essayé plein et les effets secondaires étaient terribles), j’ai eu l’anneau NuvaRing et mes règles sont devenues noires. Après le diagnostic d’endométriose, j’ai essayé un stérilet avec libération d’hormones. J’ai été extrêmement dépressive. J’ai essayé d’autres traitements hormonaux, mais j’oublie les noms puisque j’en ai beaucoup essayé. J’ai finalement rencontré une nouvelle gynécologue, référée par mon ancien, qui m’a prescrit le Lupron Dépôt qui a clairement fait une différence, mais comme je le disais j’ai moins de libido et parfois des douleurs lors des relations sexuelles. J’ai reçu un diagnostic d’anxiété généralisé, potentiellement suite à tout ça.

Comment l’endométriose affecte votre vie quotidienne ? J’ai toujours été affectée par mes douleurs. Je manquais des jours d’écoles, au travail, beaucoup d’évènements sociaux de peur que mes douleurs me prennent par surprise ou parce qu’elles étaient déjà présentes. Avant mon Lupron, j’ai étudié en théâtre et comme c’est du travail super physique, j’ai dû me réorienter, puisque je ne pouvais pas toujours être présente au travail. J’ai été agente de bord par la suite, mais comme les douleurs ont refait surface, j’ai abandonné.

Comment l’endométriose affecte votre bien-être émotionnel ? Avant mon Lupron, je dormais mal puisque j’avais toujours mal. Je me réveillais en pleine nuit paralysée par la douleur. Après le Lupron, j’ai souffert beaucoup d’anxiété à chaque nouveau partenaire. Mon conjoint actuel est très compréhensif, mais je me sens toujours mal de ne pas pouvoir lui donner autant de plaisir qu’il le voudrait, par manque d’envie et par peur des douleurs. J’entame bientôt un processus d’avoir un enfant et je suis très anxieuse à savoir si le processus sera sans douleurs, mais surtout fructueux.

Comment l’endométriose a marqué des tournants dans votre vie jusqu’à présent et dans l’avenir ? À 28 ans, je suis retournée à l’école, après une longue année de dépression/burnout, à cause de mes douleurs, de mes «échecs» de carrière, pour me lancer dans une profession qui ne me demanderait pas d’effort physique et que je peux faire dans le confort de ma maison. J’ai choisi le graphisme sachant que je pourrai toujours travailler de mon lit si jamais les douleurs reprennent. Ce qui m’inquiète beaucoup, maintenant, c’est de devoir arrêter le Lupron pour essayer de tomber enceinte. Je ne sais pas si les douleurs vont revenir, mais je m’en doute, puisqu’une échographie endovaginale, malgré le Lupron, est d’une torture effroyable, me donnant envie de pleurer sur la table d’examen.

Comment est-ce que vous avez trouvé de l’espoir ou du soutien au cours de votre parcours avec de l’endométriose ? Mes parents ont toujours été là pour me soutenir, surtout après la première opération, où mon père s’est rendu compte du sérieux de la chose. Ma nouvelle gynécologue est extraordinaire et compréhensive, ce qui est très précieux. Mon conjoint aussi, me supporte beaucoup, et n’a pas peur d’affronter les défis que représentent le projet d’avoir un enfant pour nous. J’ai aussi des bonnes assurances et la compagnie de Lupron qui payent mon médicament, puisque c’est extrêmement cher. Sans ça, je ne pourrais avoir ce traitement. Mon pharmacien aussi, s’assure toujours que j’ai ma prescription au bon moment. J’ai aussi la chance d’avoir une patronne incroyable qui est très flexible et compréhensive. Mais tout ça, c’est depuis 3 ans. Avant, je n’avais pas toute cette chance.

À quoi devraient ressembler les soins de santé pour l’endométriose au Canada selon vous ? Ça devrait être une maladie reconnue, à laquelle les médecins de famille ou les médecins des salles d’urgences ou cliniques, sont sensibilisés. Pour ne pas ridiculiser ou invalider les ressentis et symptômes de celles qui en sont atteintes. Les délais sont longs aussi, pour avoir une échographie endovaginale, dans certains hôpitaux, elles devraient être traitées au même titre que les échographies obstétricales.

D’après vous, que devrait-on savoir du vécu des personnes atteintes d’endométriose au Canada ? Que bien que ce soit une maladie invisible de l’extérieur (quoique, combien de fois me suis-je fais demander si j’étais enceinte, puisque j’ai souvent le ventre enflé), que c’est une maladie horrible, unique à chacune et qu’il s’en doit d’être respectée et écoutée. Les gens devraient être plus informés sur la maladie, afin de pas invalider les gens autour d’eux. Comme avoir un enfant est vraiment valorisé dans notre société, il serait bien de changer ça, pour le bien-être de toutes ces femmes qui ont des problèmes de fertilité. Puisque de se faire marteler par la pression de procréer, et ce, souvent par des inconnus, peut être extrêmement déprimant et lourd à porter.