À quoi ressemblent vos symptômes d’endométriose ? Les jambes deviennent complètement engourdies et me font perdre toute ma force. J’ai une sensation de pointe de couteaux et de brûlure mélangés ensemble lors d’une crise de douleurs. Aussi souvent accompagné par la sensation d’une ecchymose très, très vive accompagnée d’une torsion. Puis, la majeure partie du temps, je suis incapable de faire des abdominaux ou des mouvements qui donnent des « chocs » au bas du ventre (course à pied, saut, même la marche parfois). J’ai aussi le ventre qui enfle en un instant, sans raison apparente, pour en venir à cacher mes pieds (c-à-d je semble enceinte de 6 mois). C’est une sensation de peau qui tire, comme si tout allait exploser. J’ai aussi un nerf en tension au moment des relations sexuelles, ne serait-ce que l’excitation est douloureuse. Par la suite, la pénétration est constamment douloureuse, comme appuyer sur une ecchymose très invasive. Et la douleur se poursuit pour 2 à 3 jours par la suite. Tout ça fait aussi en sorte que mes vêtements sont rapidement inconfortables, incapable de supporter du poids ou de la pression sur le bas du ventre.
Comment a été votre parcours vers un diagnostic d’endométriose ? J’ai toujours eu des douleurs aiguës durant mes règles depuis la toute première fois à l’âge de 10 ans. Les douleurs n’ont fait qu’augmenter année après année. J’ai manqué un à trois jours d’école à rester à la maison ou à l’infirmerie. Puis, le tout a continué sur le marché du travail. J’ai toujours eu la chance d’avoir un emploi entourée de femmes ou d’être travailleur autonome, ce qui m’a permis d’être entourée de gens compréhensifs. J’ai pris des hormones dès le début pour aider les douleurs, mais rien de plus. Puis, à l’âge de 26 ans, j’ai commencé à avoir des douleurs durant les relations sexuelles, mais de manière aléatoire. Réalisant que la situation s’aggravait et commençait à devenir problématique, j’ai décidé de consulter quelques années plus tard, soit il y a 4 ans. C’est à ce moment que j’ai entendu le terme « endométriose » pour la première fois. S’en sont suivi plusieurs autres consultations, plusieurs essais de traitements hormonaux, changement de gynécologue à trois reprises pour enfin ne pas être « obligée » de faire des enfants pour voir mon problème réglé. Je n’ai toujours pas trouvé un traitement hormonal qui me convient, même après quatre ans. J’ai même eu une augmentation des douleurs suite à la prise de traitements hormonaux. J’ai eu l’apparition de kystes (dont 3 ont rompu dans la même année), ainsi que de fibromes. J’ai essayé la physiothérapie et l’ostéopathie, mais je n’ai pas les moyens de m’offrir ces traitements sur une base régulière pour en voir des effets positifs. Le diagnostic n’a pas encore été confirmé, on ne m’a pas encore permise d’avoir une laparoscopie, malgré ma forte réaction aux hormones et la probable présence d’adhérences. Vivement une démocratisation des soins, et de ne pas prendre la femme uniquement comme une mère!
Quelle a été votre expérience avec les traitements pour l’endométriose ? Les traitements hormonaux: j’ai des nausées, des étourdissements, une forte prise de poids rapide, une fatigue excessive, des changements d’humeur inattendus. Je n’ai toujours pas trouvé un traitement hormonal qui me convient, même après quatre ans. J’ai même eu une augmentation des douleurs suite à la prise de traitements hormonaux. J’ai eu l’apparition de kystes (dont 3 ont rompu dans la même année), ainsi que de fibromes. Les traitements « physiques » (physiothérapie, ostéopathie): demande une rigueur dans l’application des traitements, donc peut être extrêmement onéreux si on ne détient pas d’assurance.
Comment l’endométriose affecte votre vie quotidienne ? Je suis incapable de faire de longues marches, puisque la douleur envahie rapidement mon corps. J’ai dû arrêter un programme de danse accompagné d’une bourse à cause de mes trop fréquentes annulations. Je dois régulièrement annuler des évènements sociaux à cause de mes douleurs. Je fais plus souvent des erreurs et manque énormément de concentration au travail. Je ne peux pas accomplir toutes les charges que j’avais pas le passer.
Comment l’endométriose affecte votre bien-être émotionnel ? Je fais énormément d’anxiété de performance, et celle-ci est exponentielle puisque mon potentiel de concentration, de travail sans erreurs est une préoccupation constante. Je suis constamment fatiguée, je suis incapable de faire des nuits complètes puisque je suis réveillée par des douleurs ou des crises d’anxiété. Mon couple va bien, mais je suis incapable d’avoir des relations sexuelles, bien que l’envie y soit. Je me sens constamment coupable de ne pas pouvoir vivre de l’intimité avec lui. Comme si notre couple n’allait jamais pouvoir pleinement s’épanouir.
Comment l’endométriose a marqué des tournants dans votre vie jusqu’à présent et dans l’avenir ? La question de fonder une famille est bien sûr arrivé au moment du diagnostic. Mais je n’avais pas envie de me sentir forcée ou obligée d’en faire. Puis, plus le temps a avancé, plus la décision s’est précisée de ne pas en vouloir. Par contre, le traitement qu’offre les gynécologues ou les médecins envers la situation est systématiquement: on ne peut rien faire qui peut t’empêcher d’avoir des enfants. Tu vas voir, tu vas en vouloir. Tu vas voir, tu vas changer d’idée.
Comment est-ce que vous avez trouvé de l’espoir ou du soutien au cours de votre parcours avec de l’endométriose ? Ma famille m’aide énormément et est constamment à l’écoute, sans jugement. Elle est toujours présente pour moi. Mes employeurs, quant à elles, sont deux femmes ayant aussi des problèmes de leur côté, donc elles m’obligent à faire du télé-travail et me reposer quand je n’ose pas le demander 😉 Mon amoureux est un homme exceptionnel, compréhensif, à l’écoute, doux. Un groupe de soutien sur Facebook m’a permis de me sentir moins seule avec mon problème, mes douleurs.
À quoi devraient ressembler les soins de santé pour l’endométriose au Canada selon vous ? L’accessibilité des soins médicaux devrait être plus rapide et plus efficace. Les soins thérapeutiques devraient être plus accessibles pour tous les budgets, que ce soit la psychothérapie, la physiothérapie ou tout autre forme de complément ou d’alternative. Les médecins devraient être réellement à l’écoute de leurs patients, arrêter de voir la femme comme une mère avant une personne à part entière. Bien décrire toutes les options, les pour et les contre de chaque. Une éducation dès le départ auprès des jeunes sur la situation de l’endométriose et un retour de l’éducation sexuelle, avec tout ce que ça implique. Encourager et éduquer les conjoint(e)s, les familles et les milieux de travail des personnes atteintes.
D’après vous, que devrait-on savoir du vécu des personnes atteintes d’endométriose au Canada ? L’endométriose est une maladie extrêmement difficile à diagnostiquer qui atteint une femme sur 10. Les douleurs liées aux menstruations peuvent être possibles, mais deviennent problématiques et inquiétantes à partir du moment où elles font manquer le travail ou l’école. Ce n’est pas normal de devoir reprogrammer sa vie à cause des menstruations qui sont inévitables dans le corps d’une femme. Il est important d’éduquer sur le fait que ce n’est pas de la faiblesse que d’avoir des douleurs menstruelles handicapantes. C’est un problème envahissant incontrôlable.